Manager pour mieux durer
Les enjeux liés à la transition énergétique, à la décarbonation et au développement durable présentent des défis, mais ouvrent également des perspectives variées aux entreprises du secteur de la construction et le management joue un rôle central pour aborder au mieux cette mutation nécessaire.
Jefferson Konchie,
chef de projet carbone - sustainable development engineer au CDEC - Conseil pour le Développement Économique de la Construction
« Pendant longtemps, la performance économique des entreprises a été mise en avant au détriment de leur impact environnemental, mais avec la volonté grandissante des pouvoirs publics et des citoyens d’évoluer vers une société plus durable, l’efficacité énergétique puis l’efficacité environnementale ont progressivement été prises en compte.
Toute démarche de réduction des gaz à effet de serre commence par une cartographie des flux et de la chaîne de valeur. Les postes émetteurs sont recensés, des données quantitatives sont récoltées et une éventuelle dépendance à la sous-traitance est identifiée avant de définir des leviers d’action. Les scopes 1 et 2 du bilan carbone concernent principalement l’optimisation énergétique, tandis que le scope 3 porte sur la limitation des sources de gaspillage et l’optimisation des besoins logistiques, avec des objectifs de diminution de 50 % des émissions de GES d’ici 2030 et de neutralité carbone d’ici 2050.
Nos travaux dans le cadre de la feuille de route pour la décarbonation de la construction, établie en collaboration avec le ministère de l’Économie, se répartissent en trois tâches : collecter des informations dans les entreprises, collecter les informations sur les chantiers et étudier les flux de transport et d’énergie sur les chantiers. Ils visent à faire ressortir des moyens et des indicateurs-clés pour mesurer l’efficacité du secteur à réduire son empreinte climatique, avec des objectifs en matière d’intensités énergétiques et d’intensités environnementales qui reprennent, en partie, les objectifs-cadres fixés par la CSRD ».
Romain Guillaud,
innovation project manager au CDEC - Conseil pour le Développement Économique de la Construction
« Nous menons actuellement une étude consistant à dresser une cartographie représentative de la chaîne de valeur à l’échelle du secteur de la construction. Nous nous basons pour cela sur des bilans carbone établis au Luxembourg par un panel de grandes, moyennes et petites entreprises. Malheureusement, dans un contexte économique difficile, il n’est pas toujours facile pour les entreprises, notamment les plus petites, d’allouer des ressources spécifiques à la collecte de données permettant l’évaluation de l’empreinte carbone.
Pourtant, pour atteindre l’objectif de neutralité carbone, toutes les entreprises devront innover, se réinventer, et donc au préalable mesurer leur empreinte climatique pour pouvoir identifier ce qu’elles doivent améliorer.
La décarbonation est une opportunité d’intégrer de nouvelles technologies, de nouveaux outils,
matériaux (biosourcés, à faible empreinte carbone...) et processus dans la façon dont on construit et dont on rénove. Mais, au-delà d’être un nice-to-have, ce sera bientôt une obligation légale. Même si la CSRD ne s’appliquera dans un premier temps qu’aux grandes entreprises, les plus petites devront rapidement se mettre à jour pour rester compétitives car, pour obtenir un marché, les grandes entreprises demanderont à leurs sous-traitants de fournir des données.
Notre rôle est d’accompagner nos membres dans cette transition et de les aider à préparer l’avenir. Nous le faisons, entre autres, en leur proposant des formations gratuites, voire pour lesquelles ils peuvent être rémunérés, en développant des outils numériques permettant de faciliter la collecte de données et en mettant à leur disposition le savoir-faire acquis à travers cette étude ».
Clément Wampach,
Managing Director de TK Elevator Luxembourg
« Une tendance lourde - et plutôt récente - est d’intégrer toutes les parties prenantes dans la démarche durable de l’entreprise. C’est une évolution que j’observe avec beaucoup de satisfaction, car elle génère une collaboration positive et innovante entre toutes les sociétés vers un même objectif.
Aujourd’hui, il est de plus en plus clair pour tous que les objectifs de durabilité poursuivis par une entreprise ne se limitent pas à sa seule structure juridique. L’entreprise citoyenne et responsable est consciente de son rôle et de sa place au sein de son écosystème, en partageant activement les valeurs de développement durable, d’éthique et d’intégrité, de respect des droits humains et de santé et sécurité au travail ».
Paul Nathan,
directeur de l’entreprise Poeckes
« Une entreprise n’est pas un organisme statique. Elle se transforme de manière permanente et de plus en plus rapide, comme le montre l’évolution de l’entreprise Poeckes qui vient de fêter ses 100 ans et qui est passée, au fil des générations, de l’exploitation minière à la construction.
Aujourd’hui, nous sommes de nouveau à un tournant de notre histoire et, si nous voulons attirer et fidéliser de jeunes talents mais aussi générer une valeur ajoutée dans la société pour le futur, nous devons plus que jamais remettre en question nos processus et nos investissements. Et ce, en nous appuyant sur un plan d’actions concret, car la jeune génération est en recherche de sens dans son travail et elle est sensible à des sujets comme la transition énergétique et la responsabilité sociale et environnementale des entreprises.
Chacun sait que nous traversons actuellement une crise conjoncturelle. Nous avons donc « la tête dans le guidon », mais il faut parfois redresser la tête pour regarder l’horizon. Ces changements ouvrent des perspectives. Ils comportent des risques, certes, mais aussi des chances : la transition énergétique, la décarbonation et la transformation digitale ouvrent de nouvelles opportunités pour les entreprises de construction.
Les ressources humaines jouent un rôle clé dans tout ce que nous faisons : c’est la ressource la plus importante de l’entreprise, ce sont ses mains et sa tête. C’est pourquoi nous avons plus que jamais besoin de compétences et la formation continue est cruciale car on peut acheter une machine, mais la ressource humaine, il faut la développer ».
Carl Kleefisch,
membre de la direction de LSC360
« Chez LSC360, le choix d’un management durable n’est pas un simple effet de mode, mais une réponse réfléchie aux défis auxquels nous faisons face en tant qu’entreprise d’ingénierie. Cette approche vise à concilier nos objectifs de performance avec notre responsabilité envers nos collaborateurs, nos clients et notre environnement.
Nous avons adopté ce type de management pour plusieurs raisons. Tout d’abord, le monde de la construction évolue rapidement, et nous devons anticiper ces changements avec agilité et innovation. En valorisant les compétences individuelles et collectives, nous créons un environnement de travail propice à l’épanouissement de chacun. Ensuite, le management durable nous permet d’être exemplaires dans nos pratiques, en intégrant des principes de gouvernance responsable et en optimisant l’utilisation des ressources.
Ce modèle apporte également d’autres avantages : une meilleure collaboration entre nos équipes très pluridisciplinaires, une attractivité renforcée auprès des talents et une confiance accrue de nos partenaires. Il s’inscrit parfaitement dans notre mission de fournir des solutions exhaustives, durables et adaptées aux besoins de nos clients.
Pour LSC360, le management durable n’est pas seulement un choix stratégique : c’est un investissement dans un avenir où innovation et responsabilité vont de pair ».
Propos recueillis par Mélanie Trélat
Extrait du Neomag #67 - Retrouvez l’article complet