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Focus sur une thématique pointue à travers le regard aiguisé d’experts en la matière

Publié le 20 septembre 2024
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septembre 2024

Quartiers, urbanisme, territoire

Quartiers, urbanisme, territoire
Édito de Bruno Renders, administrateur-directeur général du CDEC
Édito de Bruno Renders, administrateur-directeur général du CDEC

La planification urbaine et la réalisation de nouveaux quartiers ou la rénovation de quartiers existants est sans aucun doute un élément structurant et structuré de notre environnement bâti. Elle ne saurait donc éluder une implémentation efficiente de la nature, de la biodiversité, de la végétalisation au sein de ceux-ci.

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Dans les projets de planification urbaine durable actuels, la question de la biodiversité, comme celles de la décarbonation ou de l’éco-circularité par exemple, sont encore souvent considérées comme périphériques. Pourtant, la seule manière de les aborder de manière résiliente consiste, à mes yeux, à les aborder avec une vision holistique.

L’évolution réglementaire européenne montre que cette approche intégrée est en passe d’être adoptée. Cela transparaît notamment dans le green deal et dans la taxonomie verte dont les six objectifs sont d’atténuer nos impacts sur le changement climatique et s’y adapter, passer à l’économie circulaire, protéger l’eau et les ressources marines, prévenir les pollutions environnementales, préserver la biodiversité et les écosystèmes. Mais la démarche reste encore principalement motivée par la réglementation, alors qu’elle pourrait être plus active, plus dynamique. La biodiversité recèle un certain nombre de fonctions qui offrent des perspectives intéressantes pour notre futur environnement bâti. Elles dépassent de loin le simple cadre visuel, mais peuvent être actives.

Je plaide donc pour intégrer la biodiversité dans la planification urbaine. Créer une micro-forêt, une toiture ou une façade végétalisée, plutôt que de planter des arbres devant chaque maison comme on le fait traditionnellement, peuvent se révéler être des exemples de solutions naturelles et résilientes, où la biodiversité forme un trait d’union entre les problématiques a priori séparées que sont le drainage des eaux pluviales et la réduction des îlots de chaleur.

Il ne faut pas opposer les choses, mais les intégrer, ce qui implique aussi de développer des nouvelles compétences et de mettre en place des projets pilotes.

Extrait de Neomag #65

Perspectives sur l'urbanisme et l'aménagement durable
Perspectives sur l’urbanisme et l’aménagement durable

Alors que l’Europe s’engage sur le développement urbain durable, les acteurs du terrain partagent leur vision de la ville de demain. De la Nouvelle Charte de Leipzig aux innovations, ce recueil de témoignages met en lumière les défis et solutions pour créer des quartiers à la fois respectueux de l’environnement, inclusifs et économiquement viable.

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Au-delà des murs, ouvrir la réflexion à l'humain et à l'environnement
Au-delà des murs, ouvrir la réflexion à l’humain et à l’environnement

Le LIST mène plusieurs projets en lien avec la conception de nos futurs lieux de vie. Loin de se focaliser sur le bâtiment, l’approche est holistique car au-delà d’un toit sous lequel se loger ou travailler, il est aujourd’hui question de résilience face au changement climatique et de vie sociale harmonieuse. Tour d’horizon.

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Interview de Perla El Boueiz, chargée de partenariats construction durable au Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST)

Depuis le début de cette année 2024, le LIST coordonne le programme européen REGEN qui porte sur « la régénération des quartiers vers un environnement bâti à faible émission carbone, inclusif et abordable ». En parallèle, il travaille, avec le soutien du Fonds National de la Recherche Luxembourg (FNR), sur le projet NBenefit$, dont l’objectif est de proposer au marché un nouvel outil d’aide à la décision se basant sur une analyse coûts-bénéfices des solutions fondées sur la nature, et de favoriser la biodiversité urbaine. L’institut a aussi récemment obtenu un financement à travers le programme FNR BRIDGES pour la création d’un nouveau label luxembourgeois évaluant les quartiers urbains, neufs ou regénérés, vis-à-vis de leur durabilité et résilience, en partenariat avec LSC Engineering et avec le support de Neobuild GIE. Pourquoi avoir choisi ces axes de recherche ?

Ces recherches menées au LIST ont toutes un point commun : avoir un impact positif pour la société et l’environnement. Notre environnement bâti joue ici un rôle prépondérant. Il influence non seulement la croissance économique de nos sociétés, mais aussi notre bien-être. C’est en ce sens que notre équipe d’experts en architecture, développement urbain, génie civil et environnement développe des solutions de décarbonation intelligentes et durables pour les villes et les territoires.

Vous travaillez sur la régénération urbaine. Comment cette notion se définit-elle ?

Il s’agit d’une évolution urbaine qui se base sur les propres ressources de la ville et se focalise sur la rénovation, le réaménagement et la circularité. Le LIST est actif sur ces thématiques, notamment via des projets Interreg visant à augmenter la quantité des matériaux de construction récupérés et réutilisés, créer des plateformes de réemploi des éléments de construction et réfléchir à une stratégie de développement des centres de réutilisation au niveau local ou régional.
Récemment, le projet REGEN, dirigé par le Dr. Arch Sylvain Kubicki, a démarré avec l’objectif de proposer un nouveau cadre d’évaluation pour la régénération urbaine, facilitant la sélection des stratégies d’intervention appropriées, tout en tenant compte des utilisateurs finaux et de toutes les parties prenantes. Pour ce faire, les chercheurs bénéficient du support de MUST (Managing Urban Spaces Together), une technologie participative - précédemment développée par le LIST avec le support du FNR - permettant la collecte et la prise en compte des préférences des citoyens dans le développement de leurs quartiers. Le cadre de REGEN sera appliqué sur quatre sites de démonstration, dont la commune de Beckerich, avec un suivi continu des bâtiments, rues et quartiers en termes d’énergie, de mobilité et de circularité.

Pouvez-vous nous en dire plus sur l’outil NBenefit$ que le LIST est en train de développer ?

L’outil a pour objectif de quantifier le coût économique de la contribution des espaces verts au bien-être, vis-à-vis de la séquestration du carbone, de la purification de l’air, de l’infiltration de l’eau, de la mise à disposition d’espaces récréatifs et de la régulation de la température et de l’humidité. NBenefit$ a été appliqué pour le Valdebebas parc à Madrid, pour simuler et évaluer la manière dont les services fournis par la nature évoluent selon différents scénarios de conception : en modifiant l’agencement du parc, le type d’espèces d’arbres utilisées et la manière dont le parc est entretenu pendant son cycle de vie. Cela aide les planificateurs et les décideurs à concevoir des solutions fondées sur la nature de manière rentable.
Ce projet, dirigé par le Dr. Claudio Petucco, bénéficie actuellement d’un financement FNR JUMP, permettant de compléter les développements et transférer l’outil vers le marché, comme un outil d’aide à la décision dès les premières étapes de la conception d’un projet.

Sur des projets aussi concrets que ceux que nous venons d’évoquer, est-ce que vous collaborez avec des acteurs privés ?

Certainement ; comme évoqué plus tôt, notre objectif est de mener une recherche qui réponde aux défis actuels et futurs de notre société. Une proximité du marché et une collaboration avec des partenaires privés sont donc essentielles, que ce soit pour des nouveaux développements, des cas pilotes, ou encore pour le transfert des technologies. Cela est d’autant plus important aujourd’hui pour le secteur de la construction, qui a besoin d’innover, mais aussi d’intégrer de nouvelles et bonnes pratiques.

Par exemple, nous allons bientôt débuter un nouveau projet, en partenariat avec LSC Engineering et avec le support du FNR, visant à proposer un label luxembourgeois pour les quartiers résilients. Tout au long de ce projet, l’accompagnement et le support d’un comité de parties prenantes des secteurs privés et publics sont prévus pour assurer le succès du projet.
Mélanie Trélat

Extrait de Néomag#65

Urbanisme et aménagement du territoire : entre innovation et expertise
Urbanisme et aménagement du territoire : entre innovation et expertise

Le Luxembourg est un terrain fertile pour les innovations en matière d’urbanisme et de gestion territoriale. La gestion efficace des quartiers ou l’optimisation des espaces sont des enjeux cruciaux pour le développement du pays. Reportage Seco.

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Avec une population qui a atteint 672 050 personnes au début de 2024, réparties sur une superficie de 2 586 km2, les efforts d’aménagement deviennent cruciaux pour maintenir un cadre de vie de qualité et une gestion durable de l’espace​.

La réinvention des quartiers, un défi et une opportunité

La transformation des quartiers est une nécessité dans un pays en pleine expansion comme le Luxembourg. Chaque projet d’aménagement urbain, qu’il concerne la rénovation d’un quartier existant ou la création d’un nouveau, implique une réflexion approfondie sur l’utilisation des espaces et les besoins futurs des résidents. L’expertise locale démontre que cette réflexion ne se limite pas à la simple construction de bâtiments. Elle englobe également des aspects comme la gestion des infrastructures, la préservation de l’environnement et la création d’espaces publics fonctionnels et attrayants.

Dans le cas d’une réhabilitation de quartier par exemple, une compréhension approfondie des dynamiques sociales et économiques locales est nécessaire. La réussite d’un tel projet repose sur l’intégration réussie des nouveaux aménagements avec les structures existantes tout en répondant aux besoins des habitants actuels et futurs. Cette approche intégrée est essentielle pour garantir une transition en douceur et créer des quartiers où les résidents peuvent s’épanouir.

Il est également à noter que l’urbanisme durable est devenu un impératif. L’objectif est de concevoir des quartiers qui minimisent leur impact environnemental tout en maximisant le bien-être et la sécurité des habitants. Cela implique l’utilisation de technologies avancées pour la gestion des ressources, la réduction des déchets et l’amélioration de la qualité de l’air et de l’eau, par exemple.
Dans ce contexte, la gestion des espaces verts joue un rôle important. Les espaces verts ne sont pas seulement des lieux de détente, ils contribuent également à la régulation thermique et à la gestion des eaux pluviales. Les projets urbains qui intègrent des parcs, des jardins communautaires et des zones de biodiversité montrent comment l’intégration intelligente de la nature peut enrichir les environnements urbains.

Dans de telles situations, il est alors nécessaire d’optimiser et de réorganiser les territoires. Le remembrement est une pratique qui vise à réorganiser les parcelles de terrain pour en améliorer l’utilisation et la valeur. Ce processus est souvent motivé par la nécessité de moderniser les infrastructures et de répondre aux nouveaux besoins de la population. Un remembrement réussi nécessite une analyse détaillée des caractéristiques géographiques, des usages actuels et des projections de développement futur. Une série de travaux préparatoires permettra de définir les objectifs attendus et d’optimiser l’utilisation de l’espace tout en préservant au maximum les ressources. Une approche minutieuse et réfléchie pour garantir l’équilibre développement / durabilité. L’utilisation de technologies modernes pour collecter et analyser les données spatiales facilite cette évaluation. Les cartes détaillées et les modèles numériques du terrain permettent de visualiser les potentialités de développement, d’identifier les zones à revitaliser et d’optimiser la disposition des nouvelles infrastructures.

Pour mettre en œuvre ce type de projet, de nombreux interlocuteurs doivent être impliqués en fonction des phases. Ces parties prenantes - autorités locales (autorisations…), ingénieurs (concepts), géomètres (mesurages, relevés terrain, limites cadastrales…), urbanistes, bureaux de contrôle, bureaux d’études, organismes agréés, propriétaires… - collaborent pour assurer une planification équilibrée et inclusive.

La collaboration : clé du succès dans l’aménagement urbain

La collaboration entre différents acteurs du secteur est essentielle pour mener à bien les projets d’aménagement urbain. SECO et Geolux interviennent dès les prémices de ces projets, en apportant leur expertise à chaque étape cruciale. SECO peut accompagner ses clients dans la conception et le contrôle des bâtiments entre autres, tandis que Geolux les accompagne dans les mesurages officiels, les relevés de terrains ou encore les remembrements par exemple. Depuis la phase de conception jusqu’aux contrôles périodiques post-construction, en passant par le mesurage des parcelles et les réceptions des bâtiments, l’implication est constante. Cette approche collaborative permet de tirer parti des différentes compétences et perspectives, conduisant à des solutions plus complètes, personnalisées et mieux adaptées aux besoins des collectivités.

Le Luxembourg continue d’évoluer et de se réinventer, et cela se reflète dans ses projets d’urbanisme et de gestion territoriale. Les pratiques et les expériences locales montrent que l’innovation, la collaboration et une compréhension approfondie des besoins sont essentielles pour créer des environnements urbains de qualité. À travers ces projets, il devient clair que l’aménagement du territoire au Luxembourg est bien plus qu’une simple question de construction ; c’est un processus complexe qui requiert une vision claire, une expertise technique et une collaboration étroite entre tous les acteurs impliqués. En continuant sur cette voie, le Luxembourg pourra offrir à ses citoyens des espaces de vie de qualité, adaptés aux défis de demain.

Extrait de Néomag#65

La « Ville de la pleine conscience » de Gelephu au Royaume du Bhoutan
La « Ville de la pleine conscience » de Gelephu au Royaume du Bhoutan

Aujourd’hui, Neobuild vous emmène aux confins orientaux de la chaîne himalayenne, au Royaume du Bhoutan, pays bouddhiste notamment connu pour l’adoption et l’inscription dans sa constitution de l’indice BNB –bonheur national brut– qui mesure autrement que par des indices strictement financiers le niveau de bonheur et de bien-être de sa population.

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Voici donc un programme disruptif et exigeant à l’attention des architectes de Bjarke Ingels Group (BIG), quant à développer une ville nouvelle qui tienne compte des aspirations d’une population entière à préserver l’environnement et les ressources de son pays, à soutenir un développement économique et social équitable et durable, sans négliger la bonne gouvernance. Depuis le Luxembourg, un programme certes exotique mais qui amène néanmoins à réfléchir à nos modes de vie occidentaux.

Programmation

Lors du 116e discours de la fête nationale, prononcé devant 30 000 personnes, Sa Majesté le roi Jigme Khesar Namgyel Wangchuck a présenté sa vision d’un nouveau centre économique au Bhoutan, le premier pays au monde à ne « pas » émettre de carbone. Situé dans la ville de Gelephu, dans le sud du Bhoutan, le plan directeur de plus de 1 000 km2 intitulé « Ville de la pleine conscience » élaboré par BIG, Arup et Cistri s’inspire de la culture bhoutanaise, des principes de l’indice du bonheur national brut et de l’important héritage spirituel du pays.

La future région administrative de Gelephu tirera parti de sa situation et de sa connectivité avec l’Asie du Sud et du Sud-Est pour jeter les bases de la croissance future du pays et créer des opportunités économiques pour ses citoyens grâce à des investissements dans les technologies vertes, l’éducation et les infrastructures. Conçu par l’équipe de paysagistes et d’urbanistes de BIG, le plan directeur comprend un nouvel aéroport international, des liaisons ferroviaires, un barrage hydroélectrique, des espaces publics et un langage pour les typologies de bâtiments locaux basé sur les neuf domaines du BNB (Bonheur National Brut) : bien-être psychologique, santé, éducation, niveau de vie, utilisation du temps, diversité et résilience écologiques, bonne gouvernance, diversité et résilience culturelles et vitalité de la communauté.

Créer du lien

Niché entre montagnes, forêts et rivières, le Bhoutan est l’un des derniers « spot » de biodiversité dans le monde, avec 70 % du pays couvert de forêts. La « Ville de la pleine conscience » vise à amplifier l’abondante biodiversité du pays en émergeant comme une tapisserie vibrante d’écosystèmes interconnectés et de quartiers animés, façonnés par l’écoulement des 35 rivières et ruisseaux qui traversent le site. Les quartiers en ruban qui en résultent ressemblent à des rizières, formant des terrasses urbaines qui descendent en cascade des collines vers la vallée. La densité de la ville augmente depuis les hautes terres rurales et récréatives jusqu’aux basses terres urbaines et denses.


Bjarke Ingels : « Le plan directeur de Gelephu concrétise la vision de Sa Majesté de créer une ville qui devienne un berceau de croissance et d’innovation tout en restant fondée sur la nature et la culture bhoutanaises. Nous imaginons la Ville de la pleine conscience comme un lieu qui ne pourrait exister nulle part ailleurs. Là où la nature est mise en valeur, l’agriculture est intégrée et la tradition est vivante, donc non seulement préservée mais également évoluée. Façonné par les cours d’eau, Gelephu devient une terre de ponts, reliant la nature et les personnes, le passé et l’avenir, le local et le plus lointain. À l’instar des Dzongs traditionnels, ces ponts habitables se transforment en points de repère culturels et servent à la fois d’infrastructures de transport et d’installations civiques. Parmi ceux-ci, le temple-barrage de Sankosh incarne les valeurs fondamentales de la ville dans un paysage d’escaliers et de paliers en cascade ».

Les éléments naturels et l’infrastructure existante, l’agriculture et les services publics de Gelephu créent naturellement 11 quartiers distincts à travers la zone qui couvre plus de 1.000 km2 ; chacun des 11 quartiers est conçu selon les principes du Mandala : défini par une série de typologies répétitives organisées symétriquement autour d›un espace public central, il crée une transition graduelle en termes de densité, allant de petits bâtiments dispersés dans le paysage au nord à des bâtiments de plus grande taille dans un environnement urbain au sud.

Pour protéger le développement actuel et futur contre les inondations pendant la mousson, des rizières seront créées le long des rivières et des affluents du site, du nord au sud. Elles serviront également de corridors de biodiversité pour la flore et la faune locales, laissant intactes les voies de migration des éléphants et d’autres animaux sauvages. Giulia Frittoli, associée chez BIG Landscape : « Inspiré par la culture bhoutanaise du respect et de la compassion envers les autres et la nature, le projet est conçu pour améliorer les systèmes écologiques au travers d’un développement urbain qui relie la flore et la faune, ainsi que les personnes et les idées ; il devient un témoignage du lien indissociable de l’humanité avec la nature et un exemple autour de la façon de bâtir une présence humaine durable sur Terre ».

Les quartiers de la ville, qui sont divisés par des rivières, sont reliés entre eux par trois connexions de mobilité principales. Parfois, celles-ci se doublent d’infrastructures de transport combinées à des installations civiques et culturelles, créant ainsi une série de « ponts habitables » adaptés à chacun des neuf domaines du BNB. Chacun des ponts abrite des destinations clés de la ville : le nouvel aéroport, un centre spirituel Vajrayana qui donne un aperçu des pratiques quotidiennes des moines et des maîtres de la pleine conscience, un centre de soins de santé qui constitue une rencontre entre la médecine orientale et la médecine occidentale, une université qui expose ses activités académiques, une serre hydroponique et aquaponique qui expose les pratiques agricoles anciennes et les sciences agricoles modernes aux voyageurs quotidiens, un centre culturel qui plonge les visiteurs dans la culture et les coutumes bhoutanaises et les éduque à ce sujet, et un marché orné de textiles bhoutanais.

Le dernier pont, un barrage hydroélectrique, sera construit à la frontière ouest de la ville avec un mur de soutènement en escalier qui offre des points de vue, des escaliers pour des promenades méditatives et un temple. Les visiteurs et les pèlerins peuvent monter et descendre par d’innombrables itinéraires individuels jusqu’au centre d’accueil et au temple niché sur la face de la falaise artificielle. Le temple-barrage de Sankosh incarne dans sa forme architecturale tous les éléments fondamentaux de Gelephu : la coexistence harmonieuse de la culture et de la nature, conçue comme un enfant hybride du riche héritage passé du Bhoutan et de son futur héritage prospère.

Les rues intimes, revêtues de pavés perméables, offrent une certaine résilience en permettant aux eaux pluviales de s’infiltrer dans le sol plutôt que dans le système d’égouts. Des matériaux locaux - bois, pierre et bambou - seront utilisés dans les nouveaux bâtiments, inspirés par des motifs vernaculaires tels que les rabats, les corniches, les ornements et les toitures.

Texte : BIG – Bjarke Ingels Group, traduction et adaptation par Régis Bigot, Arch. & Innovation Project Manager Neobuild GIE

Extrait de Néomag#65

Une approche intégrée et systémique
Une approche intégrée et systémique

Symbiosis, c’est un projet ambitieux pour Metzeschmelz, futur quartier exemplaire. Dans l’équipe autour d’Agora, Schroeder&Associés soutient les solutions ingénieuses pour une gestion durable de toutes les ressources. Rencontre avec Philippe Genot, cadre-dirigeant chez Schroeder & Associés et Jean-Philippe Lemaire, fondateur de IDES Engineering.

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Peut-on encore imaginer aujourd’hui un développement urbanistique qui ne soit pas pensé pour la durabilité ? Il semble évident que non. Car les solutions existent, elles sont techniques, innovantes ou/et basées sur la nature voire des méthodes parfois oubliées, elles sont calculées, planifiées, elles sont circulaires et économes en ressources, elles sont adaptées aux besoins des utilisateurs…

Tout cela existe donc, tant pour les projets de construction que pour les projets d’aménagement de quartiers ou de villes nouvelles. Encore faut-il qu’elles soient pensées, entre toutes les disciplines ou/et les partenaires d’un projet, pour être intégrées, combinées, efficaces entre elles, en phase avec les réalités du lieu et des gens, et en adéquation avec l’évolution possible ou probable des besoins. C’est là qu’il faut une vision globale, une approche transversale… et une méthodologie.

« L’intégration de solutions durables dans un projet n’est pas une action isolée ni même une fin en soi », explique Philippe Genot, cadre-dirigeant chez Schroeder & Associés. « Souvent la démarche s’inscrit dans une vision stratégique plus globale et un cadre politique – au sens premier aussi : ce qui concerne la vie de la cité ». Dans tous les cas, il est indispensable de considérer les thématiques de durabilité sur plusieurs échelles voire à tous les niveaux. « Il faut une approche systémique de la durabilité. Les projets que nous réalisons font souvent partie intégrante d’objectifs régionaux ou/et nationaux plus grands : les projets durables ont ainsi un effet sur un cadre global, comme ce cadre global aura des effets sur le projet ».

Les équipes de Schroeder & Associés, présentes depuis plus de 60 ans sur le territoire luxembourgeois qui s’est aménagé et développé en parallèle, ont inscrit dans la stratégie d’entreprise Schroeder 2030 la durabilité en lettres capitales. « Schroeder se spécialise dans ce sens pour proposer des solutions intégrées et globales. Et c’est tout le challenge dans le cadre de projets d’envergure. Cela concerne des questions autour de l’énergie, de l’eau, des matériaux, de la biodiversité ou encore de la mobilité. Et il ne faut surtout pas oublier le volet sociétal et humain, pilier essentiel de la durabilité ».

Une des idées majeures est de trouver les solutions « win-win » avec une approche intégrée et surtout systémique, qui englobe toutes les thématiques. C’est l’objectif qui sous-tend le travail de conception et de planification pour le site Metzeschmelz, qui veut créer un exemplaire « quartier du futur », durable et innovant, au départ des friches d’Esch-Schifflange.

La Team Symbiosis y veille. Après avoir dessiné les premiers contours du futur quartier avec la Ville d’Esch-sur-Alzette et la commune de Schifflange, l’équipe d’AGORA a entrepris une phase d’étude technique en partenariat avec des bureaux spécialisés : IDES Engineering, EXCEPT, WEO, AFRY, ImpactLab et Schroeder & Associés, qui y apporte ses visions d’ingénierie durable.

« Ensemble, nous pouvons imaginer de nouvelles façons de concevoir l’espace, de l’habiter, de s’y déplacer, pour impulser de nouveaux modes de vie ». L’idée derrière Symbiosis est de tout mettre en réseaux intelligents, en particulier les ressources, pour une circularité optimale. Symbiosis suppose de considérer les ressources dans leur globalité et les imagine au cœur d’un réseau d’interrelations. On y réfléchit aux endroits de croisements possibles entre les thématiques – l’eau, l’énergie, la biodiversité, les fonctions et usages - et les différentes ressources, et surtout aux solutions ingénieuses qui permettent ces interactions.

Une approche structurée

philippe genot poursuit : « pour la méthodologie, nous avons déployé une approche structurée. elle permet de trouver le meilleur chemin vers des solutions concrètes et durables, en 5 étapes clés : la phase de collecte de données (« ingrédients »), la définition de la vision et de la stratégie à adopter, la définition des solutions techniques innovantes, l’évaluation objective des solutions retenues, et enfin la création d’une feuille de route avec définition des actions concrètes ».

« Cette méthodologie structure les questionnements et thématiques, souvent complexes, autour de la durabilité. Il s’agit d’une approche simple et adaptée à tout type de projet (structure, infrastructures, …) et qui peut être appliquée à chaque stade du projet (concept, avant-projet simple ou détaillé, …). L’approche est itérative et pourra donc être réalisée plusieurs fois pour faire maturer le concept de durabilité ».

Avec Metzeschmelz, le terrain d’expérimentation et d’innovation est propice. Sur le volet eau et le volet énergie par exemple, ensemble si possible. Quand vous récupérez de l’eau chaude, il est important de se poser la question de ce que l’on peut réutiliser, comme eau mais aussi comme chaleur.

Servir d’exemple


Philippe Genot poursuit : « Dans le cadre des effets du changement climatique, il faut que le site soit résilient par rapport à des étés très secs ou des situations de pluie torrentielle. Il sera impératif de récupérer au maximum l’eau de pluie pour la faire tourner aussi longtemps que possible dans différents cycles sur le site. L’eau potable devrait servir seulement à la consommation humaine ou animale. Par ailleurs, un cycle de l’eau grise permettrait à l’eau de la douche de ne pas finir dans une canalisation évacuée hors du cycle mais plutôt d’être envoyée à une station de traitement des eaux avant de revenir dans les habitations pour d’autres usages. Cette solution implique la construction d’un réseau plus complexe, mais elle vaut le coup car elle réduit drastiquement la quantité d’eau utilisée ».

Même type de raisonnement sur le volet énergie. Symbiosis vise d’abord à valoriser au maximum les éléments naturels : photovoltaïque, aérothermie, géothermie… et mieux encore ces techniques en complémentarité pour qu’il n’y ait aucun gaspillage de ressources. On évoque un « équilibrage systémique » des énergies, reposant sur une fine distribution des ressources en fonction de l’offre et de la demande en temps réel, couplée à des techniques de stockage pour une utilisation ultérieure. On réfléchit aussi à un système ouvert qui pourra intégrer d’autres techniques dans le futur, par exemple l’hydrogène vert. « Les techniques sont connues. L’innovation, c’est de les combiner en respectant un grand principe de mise en réseau smart pour opérer une gestion équilibrée des flux », conclut Jean-Philippe Lemaire de IDES Engineering.

Il s’agit bien de combiner, de pousser les concepts, d’enrichir les réflexions en innovations, ambitieuses mais réalistes. Un des enjeux de la démarche est de servir d’exemple. Et donc de permettre aussi que, à terme, ce qui n’est pas encore prévu dans les réglementations aujourd’hui puisse s’adapter en fonction des nouveaux paradigmes. « Un espace d’expérimentation et de dialogue va se mettre naturellement en place entre les développeurs, l’État, les communes, … », souligne Philippe Genot. « Avec Metzeschmelz, nous avons une occasion de tout construire en partant d’une feuille presque blanche. C’est rare et précieux. C’est une opportunité à saisir ».

Extrait de Néomag#65

Un lien entre urbanisme et héritage Industriel luxembourgeois
Un lien entre urbanisme et héritage Industriel luxembourgeois

Il y a déjà presque deux années, était inaugurée la piste cyclable nationale PC8 entre Esch-sur-Alzette et le quartier Esch-Belval ; un tronçon de 1,9 kilomètres de longueur comprenant une surprenante passerelle surélevée de 1,2 kilomètres, dorénavant réputée comme le plus long spécimen d’Europe !

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Depuis le ciel, un paysage d’acier, de tarmac, de poutres, tôles et structures en tous genres, une étendue brunâtre dont un filigrane jaune-orangé se détache dorénavant. Culminant à 7,5 mètres de hauteur hors-sol, le véloduc (VëloDukt) permet une circulation véloce, fluide et sécurisée au travers d’un paysage diversifié et contrasté : tantôt composé de constructions récentes, tantôt à visage industriel - témoin d’un riche passé sidérurgique – et mettant en lumière et en panorama les installations d’ArcelorMittal « flanquées » et entremêlées d’un réseau d’aiguillages et de voies de chemin de fer, tantôt verdoyant lorsque le regard se perd en direction de la France toute proche. Au travers de sa structure, du choix de ses matériaux, des teintes utilisées et de l’ordonnancement de ses composants, l’ouvrage réinterprète de manière éclatante et contemporaine le langage architectural et émotionnel de ce lieu si particulier et des codes qui le définissent. Une symbiose s’établit, un lien se tisse entre les quartiers, les fonctions et les espaces, qui structure les déplacements et y invite.

Les matériaux utilisés sont en nombre réduit et plutôt robustes ; le béton armé bien entendu, mais également une quantité non négligeable d’acier fournie par ArcelorMittal : des profilés de gamme XCarb®, produits à partir de ferraille recyclée et de sources énergétiques renouvelables (éolienne et solaire), gamme certifiée par une déclaration environnementale de produit (EPD), dont certains sont livrés en version autopatinable Arcorox® (production à Belval et Differdange). Les teintes de recouvrement de la piste, les laquages chatoyants de certaines structures et l’acier autopatinable participent grandement à l’intégration physique et plastique du projet dans son contexte.

Le projet d’ensemble, dont l’achèvement complet est planifié pour l’année prochaine, comporte un premier tronçon Est (côté ville) de 530 mètres démarrant rue Henry Bessemer, coupant le boulevard Prince Henri puis empruntant parallèlement la rue An der Schmelz, passant sous les voies ferrées grâce à un tunnel (ouvrage OA1498) ; les piétons disposent d’un trottoir de 2 mètres et les cyclistes d’une piste de 2,5 mètres. Passé ce dernier, sera aménagé un parc récréatif et paysager fait d’espaces de verdure et de détente sur une surface de 1,2 hectare, au travers duquel s’amorce lentement la passerelle pédestre et cyclable qui, dans un premier temps, se ramifie en deux ouvrages de déclivité et de largeur différenciée, permettant un accès aux personnes à mobilité réduite. La passerelle se déroule ensuite, longeant tantôt un écran de 320 mètres de longueur permettant d’apporter la discrétion nécessaire sur certaines installations confidentielles du sidérurgiste, tantôt une rangée d’arbres préservés, et aux extrémités de laquelle sont aménagées des placettes élargies. La fin de la « piste » s’achève au Nord-Ouest, côté Belval, où le choix est laissé aux cyclistes d’emprunter l’une ou l’autre rampe vers l’avenue des Sidérurgistes ou l’avenue du Rock’n Roll, et aux piétons le choix de l’une des rampes ou des escaliers et de l’ascenseur spécifiquement aménagés pour eux, menant avenue du Rock’n Roll.

Régis Bigot, Arch. & Innovation Project Manager Neobuild GIE

Extrait de Néomag#65

Quand participation citoyenne et durabilité redessinent Dudelange
Quand participation citoyenne et durabilité redessinent Dudelange

Rencontre avec Cathy Mambourg, architecte de la Ville de Dudelange, et Audrey Vit, chef de projets NeiSchmelz au Fonds du Logement.

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La Ville de Dudelange vise une certification de constructions durables pour tous ses projets de construction futurs et est en train d’établir une charte afin de rester en ligne avec les principes directeurs qu’elle s’est fixés : participation citoyenne, durabilité, conservation du patrimoine, bien-être des habitants, entre autres. Des principes qui sont déjà mis en œuvre dans le plus grand projet en cours de développement avec le Fonds du Logement : la réhabilitation des friches industrielles NeiSchmelz.

Le processus de participation citoyenne accompagne les différents projets d’urbanisme et de construction de la Ville de Dudelange. Les habitants des quartiers concernés et avoisinants sont consultés à différentes étapes de la planification, lorsque les sujets sont suffisamment mûrs. Par exemple, pour le quartier NeiSchmelz, « au moment de l’élaboration des PAP, les choses étaient encore très peu concrètes pour les participants qui ne voyaient rien d’autre que la friche, mais ils ont été impliqués dans des actions transitoires qui, finalement, par ricochet, sont devenues des marqueurs forts dans le développement progressif du site. Les citoyens font également mûrir le projet du côté de l’aménageur », sourit Audrey Vit, chef de projets NeiSchmelz au Fonds du Logement. « Les réunions d’information publiques mobilisent une centaine d’habitants qui émettent souvent des questions très pertinentes, et dans les workshops, c’est une belle dynamique qui s’installe avec des participants très positifs et impliqués. Ces échanges avec les riverains sont réellement constructifs pour nous car nous avons besoin d’être sensibilisés à leur façon d’appréhender ou de vivre les choses, qui peut différer de notre vision professionnelle ».


« Il y a aussi les habitués du lieu, ceux qui l’ont déjà investi et l’occupent au quotidien, comme le collectif d’artistes Vewa, qui portent un tout autre regard sur le projet. Pour définir un programme pour le hub social, situé dans un bâtiment historique au cœur du quartier et qui sera un des pivots du site, nous avons sollicité toute une panoplie d’acteurs comme des responsables d’associations et ceux de la brasserie Kantin située dans l’ancien hall des locomotives. Nous voulons appliquer cette même approche à chaque bâtiment qui sera construit par la Ville de Dudelange sur le site NeiSchmelz et la décliner à tous les nouveaux quartiers et bâtiments de la ville », complète Cathy Mambourg, architecte de la Ville de Dudelange.

La prochaine étape de cette consultation citoyenne aura lieu dans quelques mois, quand le sol commencera à être remanié pour préparer l’accueil des futurs bâtiments et laissera apparaître les nouvelles routes et espaces publics. Les bâtiments historiques conservés servent aussi de points d’ancrage pour projeter le public dans le futur quartier.

La qualité de vie est au cœur même du projet NeiSchmelz. Elle est suscitée par la grande place accordée aux axes de mobilité douce, aux parcs et aux jardins publics, aux aires de jeu et espaces récréatifs, ainsi qu’au maintien des bassins historiques qui, en plus d’avoir vocation à retenir les eaux pluviales et à créer des îlots de fraîcheur, apporteront une certaine harmonie au site. Sur les 33 hectares qu’occupe le quartier, le taux d’occupation des bâtiments à construire n’est que de 50 %.

Le bien-être des habitants se définit aussi par la facilité d’accès aux transport publics. La ligne de chemin de fer qui longe le site est accessible via la gare existante du quartier Italie et la voiture sera invitée à rester en périphérie du quartier. « Nous avons fait en sorte de privilégier les moyens de déplacement alternatifs et de capitaliser les transports en commun disponibles, de manière à inciter les usagers à les utiliser. Nous avons également prévu que la voiture ne s’introduise que marginalement à travers le quartier, pour faciliter et sécuriser la mobilité active et les déplacements pédestres », explique Audrey Vit.

Enfin, la qualité de vie résultera aussi de l’omniprésence de la nature. La végétation sera réintroduite sur le site, avec une sélection d’espèces endémiques en adéquation avec la flore préexistante. Des connexions vers la réserve naturelle, via des passerelles, seront créées sur toute la longueur du quartier.

Les bilans biologiques réalisés en amont des travaux ont révélé que la nature a repris ses droits et que la biodiversité s’est développée depuis que l’industrie a quitté les lieux il y a plus de 15 ans. « En amont des travaux, il nous a fallu organiser le déplacement des lézards à tel endroit, le maintien de grenouilles spécifiques à tel autre, ainsi que la création en périphérie du site d’habitats pour la faune, et notamment les oiseaux », indique-t-elle.

L’eau traverse tout le site. Le ruisseau présent avant que l’industrie ne prenne possession des lieux, actuellement sous terre et visible uniquement à hauteur du CNA, du château d’eau et du Pomhouse, retrouvera sa place. L’espace public sera aménagé de sorte que l’eau puisse circuler à l’air libre, du sud au nord, tout le long des 1,5 km sur lesquels s’étend le quartier, agrémentant les promenades publiques. En deux endroits, le ruisseau se présentera dans un lit proche du naturel. Dans les espaces publics en revanche, dans le laminoir notamment, ses abords seront aménagés, intégrés dans les rues. Cela permettra de recréer un couloir vraiment écologique, adapté à la faune qui occupe ce ruisseau.

L’économie circulaire est également une ligne rouge dans les programmes de construction de la Ville de Dudelange, a l’instar du hall polyvalent récemment aménagé en face du cimetière. Modulaire, il pourra un jour être démonté pour être reconstruit dans le quartier NeiSchmelz.

L’approche cradle to cradle se traduit, sur le site NeiSchmelz, par la réutilisation d’un maximum de matériaux issus de la déconstruction des bâtiments présents sur le site. « Dans le cadre de la préservation du patrimoine historique, certains bâtiments seront remaniés, notamment le laminoir dont on ne conservera que le squelette métallique visible et qui sera complètement ouvert sur ses 600 mètres de long. Nous allons faire en sorte que l’énorme quantité de matériaux à retirer ne quitte pas le site, que les briques deviennent des pavés pour l’espace public ou des matériaux utilisés sous les voiries, par exemple. Dans la même optique, nous avons veillé à retravailler les volumes de terre sur site de manière à limiter l’envoi en décharge. Nous capitalisons sur la matière initiale en la réintégrant dans le projet de demain », explique Audrey Vit. « Dans les projets ultérieurs, nous réfléchirons à la flexibilité d’usage des bâtiments. Par exemple, nous développerons les parkings en prévoyant la possibilité, si les usages vont dans le sens d’une réduction de l’usage de la voiture dans notre quotidien, de les convertir en habitations ou autres. Par ailleurs, compte tenu de l’élasticité des cellules familiales d’aujourd’hui, nous imaginons concevoir des logements qui puissent être mutualisés ou divisés ».

Quant au concept énergétique du projet, il consiste en un mix énergétique visant la neutralité carbone et basé sur la production d’électricité solaire avec des panneaux photovoltaïques posés sur le laminoir, combinés dans un premier temps avec des pompes à chaleur et complétés potentiellement par de la géothermie de moyenne profondeur dans les prochaines années.

Mélanie Trélat
Extrait de Néomag#65

Espaces publics repensés pour une Ville-Haute moderne à Wiltz
Espaces publics repensés pour une Ville-Haute moderne à Wiltz

Rencontre avec Bob Wetzel, City Manager, et Chantal Kauffmann, échevine de la commune de Wiltz

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Wiltz se prépare à un essor démographique sans précédent avec les grands projets de développement urbain que sont Haargarten, Op Heidert et Wunne mat der Wooltz. Le centre historique de la ville, situé sur sa partie haute, sera lui aussi remanié dans les années à venir pour offrir aux futurs habitants, visiteurs, commerçants et prestataires de services un cadre de vie et de travail agréable, verdoyant, fonctionnel et inclusif.

Un processus de participation citoyenne

Les espaces publics de la Ville-Haute de Wiltz constituent un réseau cohérent et la commune veut s’assurer que leur développement se fasse en accord avec les objectifs et les besoins de l’ensemble des parties prenantes. L’objectif étant de créer un environnement de haute qualité composé d’un mobilier urbain moderne, de fontaines, d’une végétation indigène abondante et d’une zone pensée selon les principes du shared space, afin de susciter un sentiment de bien-être chez les usagers et de leur donner envie de profiter de la ville.

Pour atteindre l’acceptation et l’appropriation des nouveaux espaces par des différents types d’utilisateurs, la commune a lancé un processus de participation citoyenne pour la conception du plan directeur pour l’aménagement futur des différents espaces publics dans la Ville-Haute. Il s’est déroulé entre septembre 2022 et septembre 2023 et a impliqué des représentants du commerce et de l’HoReCa, des responsables politiques, des membres du personnel de la commune, ainsi que des habitants âgés de 35 à 65 ans et des jeunes du lycée du Nord. « Les jeunes ne sont généralement pas très enclins à participer aux réunions publiques. Nous avons pu compter sur le soutien du Jugendbureau Éislek, dont la vocation est d’aider les adolescents à s’impliquer dans la vie de leur commune et de leur région, qui a rencontré les jeunes au lycée pour les inciter à exprimer leurs désirs et leurs volontés pour l’espace public de demain », indique Bob Wetzel, City Manager.

« Les quinze lignes directrices qui ont été déterminées dans le cadre de ce processus constituent une base solide pour établir des briefings clairs à l’attention des bureaux d’études et d’urbanisme qui travaillent sur le projet. Pour vous donner des exemples : une des lignes directrices préconise que l’espace public devrait être plus proche de la nature ; une autre propose l’intégration de l’art pour enrichir et valoriser l’espace public. Respecter ces quinze lignes directrices sera un véritable défi. À certains endroits, ce sera possible et à d’autres peut-être pas, mais c’est là tout l’intérêt d’avoir un plan directeur : si nous ne sommes pas en mesure de respecter une ligne directrice, au moins nous pourrons expliquer aux citoyens pourquoi », poursuit Bob Wetzel.

Un espace partagé

Un des éléments phares de ce vaste projet de réhabilitation est la création d’un shared space. Ce concept, qui a été popularisé par l’ingénieur néerlandais Hans Monderman dans les années 1990 et a depuis été adopté dans de nombreuses villes à travers le monde, désigne une approche de l’aménagement urbain où les distinctions entre les différents usagers de la rue - piétons, cyclistes, automobilistes, etc. - sont minimisées voire supprimées, ce qui incite chacun à négocier son passage de manière informelle et à faire preuve de prudence. La chaussée s’étendra ainsi d’un côté à l’autre de la rue, de l’hôtel de ville au château, sans trottoir.

« Ce type d’aménagement permet d’augmenter considérablement la sécurité, la convivialité et la qualité de séjour dans les différents espaces et de rééquilibrer la place qu’on accorde aux différents usagers dans l’espace public. Le shared space nous permettra de disposer d’un espace beaucoup plus ouvert, où tous les utilisateurs seront à égalité et où personne n’aura de priorité sur personne. Il engendrera aussi un apaisement de la circulation. Nous aurons, par exemple, la possibilité de fermer la rue pendant l’heure de midi pour que les gens assis sur les terrasses puissent apprécier tranquillement leur déjeuner.

Cela rendra les espaces publics plus attractifs et procurera une qualité de séjour vraiment différente. L’objectif est d’augmenter ainsi la fréquence et la durée des visites dans la ville et, par conséquent, d’aider les commerces existants à se développer et de favoriser l’implantation de nouveaux acteurs économiques.

De plus, en apportant davantage de végétaux - donc d’ombre et de fraîcheur - sur le site, nous nous préparerons aux conséquences du changement climatique », explique le City Manager.
La conception est inclusive : « Tous les lieux seront naturellement accessibles aux personnes à mobilité réduite, comme le prévoit la loi qui impose de rendre tous les lieux publics accessibles d’ici 2032 », souligne Chantal Kauffmann, échevine.

L’intégration des principes de l’économie circulaire

Depuis 2015, la commune de Wiltz est précurseure au Luxembourg dans le domaine de l’économie circulaire. Elle s’engage ainsi en faveur d’une meilleure utilisation des ressources limitées de notre planète et a depuis lancé de nombreux projets pilotes. Sans surprise, l’économie circulaire a également été un guide essentiel pour la première étape de réaménagement des espaces publics : la rénovation de la place communale, à côté de l’hôtel de ville.

« Dans ce projet, ces valeurs se traduisent, par exemple, par le choix d’un éclairage qui ne produit pas de pollution lumineuse, mais aussi dans la sélection d’un mobilier urbain en bois, entièrement réutilisable », explique-t-elle. La nature y aura plus de place pour conforter la biodiversité et créer un microclimat agréable pour les utilisateurs. Afin d’éviter la surchauffe de la place en été, le nouveau revêtement du sol sera en pavés de couleur claire. L’utilisation de bois local et la réutilisation des anciennes dalles de sol pour d’autres projets sont également à l’étude.

Wiltz, capitale des Ardennes luxembourgeoises

La volonté politique qui motive ce projet est double : il s’agit à la fois de redonner ses lettres de noblesse à Wiltz, en tant que capitale historique des Ardennes luxembourgeoises, et de redynamiser cette partie importante de la ville autour des deux bâtiments emblématiques que sont le château et l’hôtel de ville.

Le projet répond également à la nécessité de préparer tous les quartiers de la ville à un nombre accru de visiteurs réguliers ou occasionnels à l’horizon 2035. « Une récente étude a mis en évidence un besoin de plus ou moins 1 500 emplois locaux supplémentaires dans les années à venir et un développement important des flux liés au tourisme national et international. On prévoit également un accroissement substantiel de la population, qui va passer de 8 200 habitants actuellement à 12 000 habitants à l’horizon 2035 avec le développement des quartiers Haargarten, Op Heidert et Wunne mat der Wooltz. Il est très important que les habitants actuels et ces nouveaux habitants soient accueillis dans une commune ou ils peuvent bien vivre, travailler et s’épanouir », précise l’échevine.

« Sur le plan économique, Wiltz a beaucoup souffert au cours des 30 dernières années pour différentes raisons. Si nous voulons lui créer un avenir plus prometteur, il faut investir maintenant. Pour relocaliser le commerce et les activités économiques dans le centre-ville, nous devons augmenter la qualité des espaces publics et la qualité de séjour pour inciter les gens à passer plus de temps dans la ville et à profiter de l’économie locale », conclut Bob Wetzel.
Les habitants et visiteurs de la ville peuvent espérer découvrir le nouveau visage du centre-ville à l’horizon 2030. C’est, en tout cas, l’objectif que s’est fixé l’équipe communale. Les travaux commenceront au mois d’octobre par la place communale, où ils devraient durer jusque fin 2025, début 2026. Ensuite, ce sera au tour des rues et places voisines.
Mélanie Trélat
Extrait de Néomag#65

L'innovation au service de projets énergétiques plus verts
L’innovation au service de projets énergétiques plus verts

Le bureau d’études techniques Goblet Lavandier & Associés a dédié une équipe et un budget à l’innovation afin de pouvoir proposer à ses clients des concepts énergétiques à la pointe de la technologie. Exemples. Interview de Nicolas Claude, administrateur chez Goblet Lavandier & Associés Ingénieurs-Conseils

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Hormis les problématiques environnementales actuelles, quels sont vos leitmotiv ?

Nous souhaitons être à la pointe de l’innovation dans le domaine de l’énergie, comme dans celui de la construction au sens large. C’est pourquoi, en 2020, nous avons ajouté une cellule Innovation à notre département Énergie, lui-même actif depuis près de 25 ans et ayant assisté entre autres, le ministère de l’économie dans la rédaction du règlement grand-ducal sur la performance énergétique des bâtiments - donc du certificat de performance énergétique (CPE) – depuis 2005. La création de cette nouvelle cellule était primordiale pour proposer à nos clients des solutions innovantes, simples et très efficaces. Le budget qui lui a été alloué permet à nos collaborateurs d’avoir l’esprit libre pour développer de nouveaux outils de calcul pour la planification, faire une veille réglementaire et technologique, intégrer des nouveautés dans nos projets et transmettre les connaissances et compétences acquises à nos ingénieurs de projets.

L’équipe Innovation compte actuellement 8 personnes issues d’horizons différents et ayant des compétences dans l’établissement de concepts énergétiques à l’échelle du bâtiment ou du quartier, dans le domaine de la production d’énergie photovoltaïque – nous avons notamment participé à la rédaction du futur règlement grand-ducal sur le sujet - ou encore dans celui de l’électromobilité.
L’équipe Énergie rassemble, quant à elle, des collaborateurs spécialisés dans la réalisation de CPE, de blowerdoor tests ou encore de simulations thermiques dynamiques qui permettent de prévoir, sur un local ou un bâtiment, l’évolution des températures intérieures tout au long de l’année en fonction de l’ensoleillement, des températures extérieures et des systèmes en place, de sorte à garantir un confort optimal à l’utilisateur.

En tant que nouveau membre du conseil d’administration de Goblet Lavandier & Associés, quel est votre rôle dans cette équipe ?

J’ai commencé ma carrière chez Goblet Lavandier & Associés il y a 9 ans, au sein même de cette équipe Énergie, qui a un fonctionnement spécifique en ce sens qu’elle intervient ponctuellement et de manière transverse sur de nombreux projets. J’ai également suivi depuis 4 ans la construction de l’équipe Innovation.

Mon entrée au conseil d’administration le 1er juillet, un an après celle de deux autres administrateurs, s’inscrit dans la logique d’évolution de la gouvernance de la société qui s’appuie sur une meilleure répartition des tâches et des responsabilités pour gagner en résilience.

Mon rôle consiste à gérer les projets relatifs à l’énergie et à l’innovation : développement de concepts énergétiques, de projets photovoltaïques ou d’électromobilité, par exemple. J’assure la direction des équipes qui travaillent sur ces projets et je suis en contact avec nos clients et partenaires. Je suis également chargé de superviser la veille technologique et réglementaire sur les sujets du moment et à venir, comme l’intelligence artificielle, le stockage de l’énergie, mais aussi les nouvelles règlementations européennes et nationales. Récemment, nous avons fait l’acquisition d’un drone pour analyser les installations photovoltaïques et les installations techniques en toiture, et en réaliser des thermographies en vue de détecter d’éventuels problèmes et de les corriger ; nos collaborateurs ont été formés pour le piloter et analyser les images. J’ai aussi pris des responsabilités concernant la stratégie de déploiement en interne d’outils numériques basés sur les nouvelles technologies, comme l’IA.

Pouvez-vous nous donner des exemples de projets innovants sur lesquels vous travaillez actuellement ?

Nous sommes en train de développer le concept énergétique du quartier Rout Lëns à Esch-sur-Alzette pour le compte de notre client IKO Real Estate. Il regroupe une trentaine de bâtiments, dont cinq bâtiments historiques qui seront entièrement rénovés et réhabilités. Il fallait que ce quartier soit quasi-indépendant en énergie. Nous avons donc développé un réseau de chaleur à très basse température (entre 5 et 20 degrés), auquel sont connectées les pompes à chaleur installées dans chaque bâtiment et qui est alimenté par quelque 300 forages géothermiques. Pour régénérer ces forages, la chaleur présente dans l’air et dans les bâtiments en été sera captée, puis injectée dans le sol où elle sera stockée jusqu’en hiver pour réchauffer les bâtiments. Le premier champ de forage est en cours de réalisation. Il compte 83 sondes géothermiques qui atteignent 200 m de profondeur. Nous avons eu une belle surprise lors du test de réponse thermique : la température dans le sol est bien plus élevée que celle qu’on observe habituellement – presque 20 degrés au lieu de 10-12 - ce qui améliore le rendement du système. Le réseau a été développé par le promoteur IKO, qui l’exploite avec LuxEnergie, au sein de la Joint-Venture Callisto S.A, avec également Encevo comme partenaire. En complément, nous avons prévu des installations photovoltaïques sur chaque bâtiment, d’une puissance totale d’environ 1 800 kW. L’électricité produite permettra de couvrir 20 % des besoins du quartier et sera autoconsommée directement par les installations des bâtiments.

Nous travaillons également sur la rénovation de la caserne de Diekirch pour l’Administration des Bâtiments Publics. C’est un projet qui porte sur une cinquantaine de bâtiments. Des panneaux photovoltaïques couplés à des systèmes de stockage d’énergie vont être installés pour arriver à une production totale d’environ 4 MW. L’énergie stockée la journée sera réutilisée la nuit pour les besoins de la caserne, et le surplus, s’il y en a, sera réinjecté sur le réseau communal. Les batteries permettront de lisser la pointe de puissance, donc de réduire les coûts pour le client et le gestionnaire du réseau.

Récemment, nous avons rédigé pour le compte de la Klima-Agence et du ministère de l’Économie un manuel, accessible sur le site de la Klima Agence, décrivant les procédures administratives à respecter pour le développement des projets d’énergie renouvelable. Dans ce cadre, nous avons été - et sommes toujours - en contact étroit avec les différentes administrations, et nous œuvrons au quotidien pour une simplification des procédures dans le développement de projets novateurs.

Mélanie Trélat
Extrait de Néomag#65

Suivi environnemental de chantier
Suivi environnemental de chantier

Interview de Markus Quack, Directeur de LSC Environmental Engineering, et Marco Huemann, Coordinateur de service Environnement

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Le bureau d’études LSC Engineering Group propose un suivi environnemental de chantier et permet ainsi à ses clients de bénéficier d’une expertise écologique garantissant le respect de la législation sur la protection de la nature et la sécurité de la planification. Les maîtres d’ouvrage, concepteurs et autorités accordent en effet de plus en plus de temps, d’énergie et de ressources à une conception respectueuse de la biodiversité. Pourtant, la nature est rarement prise en compte durant les travaux, ce qui réduit les objectifs de biodiversité du projet et peut même compromettre le chantier.

Un chantier est une installation technique ou une activité dans laquelle des équipements techniques sont utilisés dans le but de construire quelque chose. Quel est le rapport avec la biodiversité ?

Markus Quack : Dans la plupart des cas, nous construisons à des endroits où il n’y a pas encore d’infrastructure et où la nature a pu se développer (plus ou moins) librement jusqu’au début du chantier. Les espèces végétales et animales qui s’y sont installées de manière naturelle fournissent déjà d’importants services écosystémiques.

Marco Huemann : Il est en effet beaucoup plus facile et écologique de protéger quelque chose qui est déjà présent plutôt que de le replanter à grands frais. Un bel arbre, de taille et âge importants, avec des branches épaisses et des cavités, offre non seulement un lieu de nidification pour les oiseaux ou les chauves-souris, mais aussi une source de nourriture pour les insectes. La couronne ombragée nous offre également à nous, les humains, un lieu de détente en été et contribue à notre qualité de vie dans le quartier. Il est donc essentiel de protéger les habitats ou la végétation existants, car les arbres, les haies ou les prairies plantés récemment peuvent prendre des décennies avant de pouvoir remplir une fonction écologique équivalente.

MQ : De nombreux maîtres d’ouvrages reconnaissent ces effets positifs pour l’homme et la biodiversité et souhaitent intégrer la végétation existante dans leur projet. Mais pendant la phase de construction, on a surtout besoin d’une chose : beaucoup de place. Ceci est notamment le cas pour les zones de stockage, la base de vie et les accès au chantier.

MH : Et sans l’expertise nécessaire, des dégâts à la nature peuvent rapidement survenir sans que l’on s’en rende compte. Par exemple, il peut arriver que la voie d’accès au chantier doive être légèrement élargie à court terme. Dans ce cas, la clôture de protection est rapprochée des arbres existants qui sont censés être préservés. Malheureusement, leurs racines sont ainsi désormais fortement exposées au trafic de chantier. Cela a pour conséquence que les arbres ne pourront se développer pleinement en raison des dommages causés aux racines et que, dans le pire des cas, ils dépérissent en quelques années.

MQ : C’est bien sûr très dommage, car la bonne volonté des maîtres d’ouvrage est compromise par la méconnaissance ou le manque de suivi des plans.

Existe-t-il donc d’autres aspects sur le chantier que le respect de distances de protection et de sécurité ?

MQ : Ce qui est moins évident, ce sont les effets de piège dus aux fosses, aux conduites ou aux clôtures sur les chantiers. En particulier les animaux de petite taille comme les hérissons, les amphibiens, les reptiles, etc. peuvent tomber quelque part et ne peuvent plus en sortir par eux-mêmes. Pourtant, de simples dispositifs de sortie, tels qu’une planche de bois, sont souvent une bonne solution pour permettre à la faune de survivre pendant les travaux. Mais ce risque doit tout d’abord être identifié.

MH : Un autre exemple est le respect des prairies. Par souci de facilité, il arrive régulièrement que les prairies soient utilisées pour manœuvrer avec des engins de chantier, de sorte que de grandes étendues sont rapidement compactées de manière irréversible. À ces endroits, la biodiversité diminue, ce qui affecte non seulement la flore, les organismes du sol et les insectes en général, mais a aussi des répercussions sur la nourriture des oiseaux, des chauves-souris et des micromammifères.

MQ : De tels dégâts surviennent souvent lorsque les conditions météorologiques sont humides, lorsque le sol est détrempé et que les engins de chantier ont tendance à s’enfoncer. Bien entendu, un chantier ne peut pas attendre que les conditions météorologiques soient optimales ; les travaux commencent dès que toutes les autorisations sont obtenues. Dans de tels cas, il est possible de travailler avec des dalles qui répartissent mieux la pression des engins de chantier et qui protègent ainsi les zones sensibles des prairies. Mais la poussière générée par la circulation sur les chantiers, en particulier par temps sec, représente également un risque pour le développement des plantes, car leurs pores sont ainsi obstrués. Dans ce cas, selon l’emplacement, le choix d’un revêtement approprié pour les voies de chantier est souvent décisif.

Et comment le suivi environnemental de chantier peut-il aider à protéger la biodiversité existante ?

MH : Le suivi environnemental de chantier offre au maître d’ouvrage une aide importante pour la coordination des délais, des distances de protection et des zones de stockage, et lui apporte des conseils en cas de questions. En effet, dans la pratique, il est souvent difficile pour les maîtres d’ouvrage de garder une vue d’ensemble par rapport à la réglementation relative à la protection de la nature et des contraintes spécifiques imposées à son projet. Il arrive donc que des détails se perdent et que les mesures prévues auparavant ne remplissent pas la fonction souhaitée. Dans l’idéal, il est donc préférable d’intégrer le suivi environnemental de chantier dès la conception du projet afin que le chantier se déroule sans problème. En effet, en réduisant au maximum la durée des travaux, on contribue à minimiser l’impact sur la biodiversité locale.

MQ : Par ailleurs, il est souvent nécessaire de prendre des décisions rapides et pragmatiques sur les chantiers. Le fait que le suivi environnemental de chantier soit actif pendant toute la phase de chantier permet de trouver des solutions rapides aux risques qui peuvent se présenter subitement. L’expert possède un savoir-faire qui lui permet d’identifier et d’éviter les conflits potentiels au préalable, par souci de prévention.

MH : Tant le ministère de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité que l’Administration de la nature et des forêts exigent le recours au suivi environnemental de chantier (souvent dénommé « encadrement écologique ») pour que la théorie soit correctement mise en œuvre sur le terrain. Il n’est de loin pas nécessaire ou judicieux que chaque projet soit accompagné par un expert environnemental, mais seulement là où une certaine sensibilité est requise, par exemple en bordure de forêt ou de cours d’eau, ou là où la nature doit être délibérément intégrée dans le projet.

La valeur ajoutée du suivi environnemental de chantier consiste à soutenir le bon déroulement du chantier, tout en préservant la biodiversité locale.

Le suivi environnemental de chantier concerne donc en premier lieu le chantier actif. Mais que se passe-t-il une fois que le chantier est achevé ?

MH : Lorsque le chantier est achevé, il est souvent essentiel de poursuivre l’entretien afin de favoriser durablement la petite faune et la flore. Il s’agit notamment de renoncer aux pesticides et de réduire la fréquence de fauche des espaces verts.

MQ : Le suivi environnemental de chantier ne se limite toutefois pas aux chantiers classiques en agglomération. Certains maîtres d’ouvrages sont tenus de mettre en œuvre des mesures d’atténuation (CEF). Il peut s’agir de délocaliser des espèces animales et végétales, de planter des arbres, des haies, des vergers ou de créer des plans d’eau et des prairies naturelles dans la zone verte.

MH : Dans le cas des plantations, la coordination temporelle, le contrôle de la qualité et de la méthode de plantation, mais aussi le traitement du sol et la fréquence des arrosages sont des facteurs importants. Ce n’est qu’à cette condition que les plantes auront les chances optimales pour pouvoir se développer. Les conséquences négatives d’une plantation non conforme ne sont malheureusement visibles qu’un ou deux ans plus tard, lorsque les plantes dépérissent. Cela représente non seulement un facteur de coût et de conflit important pour les maîtres d’ouvrage, mais aussi un retard dans le développement d’habitats fonctionnels et de la biodiversité.

MQ : Le suivi environnemental de chantier représente donc ici aussi une interface importante entre la planification des mesures d’atténuation et leur mise en œuvre. Dans le cadre des mesures d’atténuation, le ministère de l’Environnement exige généralement un monitoring à long terme. Le monitoring consiste à vérifier le développement et l’entretien afin d’intervenir rapidement en cas de déficits. Le monitoring garantit que les mesures mises en œuvre se transforment en des habitats de grande valeur écologique et contribuent ainsi à long terme à la biodiversité locale.

Seul grâce à une étroite collaboration et des mesures coordonnées il est possible de garantir que les projets de construction aient un impact minimal sur la biodiversité et que la bonne santé des écosystèmes soit garantie. Le suivi environnemental de chantier constitue ainsi un instrument important pour mettre en œuvre avec succès la théorie sur le terrain, tandis que le monitoring en aval garantit le développement à long terme d’habitats de qualité.

Extrait de Néomag#65

Une micro-forêt revisitée au Luxembourg
Une micro-forêt revisitée au Luxembourg

Rencontre avec Stefan Chorus, Associate Managing Director de Streff, Chris Fasbender, architecte chez Vereal, et Camille Hermans, bioingénieure et Sustainability and Circular Economy Project Manager au CDEC

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Dans une prairie largement ensoleillée intégrant un bassin de récupération des eaux pluviales située à l’arrière de son bâtiment, l’entreprise Streff a déployé une micro-forêt de près de 1000 m2, un projet réalisé par Vereal par l’entremise du CDEC.

Le point de départ de ce projet est la conscience écologique de Stefan Chorus, qui incarne la 4e génération à la tête de Streff et souhaite contribuer concrètement à la biodiversité et à la durabilité de notre planète : « Je suis convaincu qu’on peut faire beaucoup individuellement : si chacun plante un arbre tous les ans, le bénéfice collectif sera immense. Vous savez quel est le meilleur moment pour planter un arbre ? C’était il y a 20 ans ! Si on ne l’a pas fait à ce moment-là, c’est aujourd’hui qu’il faut le faire ». C’est dans cet esprit qu’il s’est engagé dans un projet écoresponsable, d’abord en créant un bassin de rétention des eaux de pluie et un espace vert à l’arrière de son bâtiment, puis en y installant quelques ruches et, enfin, en plantant une micro-forêt.

Qu’est-ce qu’une micro-forêt ? Chris Fasbender, architecte chez Vereal qui a réalisé le projet pour Monsieur Streff, explique : « La méthode pour créer une micro-forêt a été développée dans les années 70 par un botaniste japonais : Akira Miyawaki, mais elle a été pensée pour un climat très différent du nôtre, donc je m’écarte toujours un peu du dogme pour adapter mes projets à leur environnement ».

Créer une micro-forêt, c’est apporter de la biodiversité, quel que soit le nombre de m2 : « On s’inspire de ce qui se passe dans la nature, où les glands du chêne tombent et germent sans se préoccuper de garder une distance de 4 ou 6 m avec leurs voisins. On plante donc très densément - 3 ou 4 très jeunes plants par m2, 1 500 à 1 600 végétaux sur ce site – et on laisse la sélection naturelle opérer. Un point important est de bien couvrir le sol en attendant qu’une couverture naturelle se crée avec le développement de différentes strates de végétaux. Dans ce projet, nous l’avons fait avec des copeaux de bois. Une bonne couverture permet de maintenir l’humidité dans le sol et d’y favoriser la prolifération d’organismes vivants qui sont indispensables pour le régénérer, le nourrir et permettre aux végétaux de croître. Les insectes, les bactéries et les végétaux évoluent en symbiose ».

Les plantes indigènes ont été privilégiées « parce qu’elles sont assez solides pour grandir dans nos régions, ne menacent pas l’écosystème et apportent une grande biodiversité ». Pour les choisir, Chris Fasbender s’est basée sur des listes établies par des associations scientifiques. Dans cette micro-forêt revisitée, on trouve, entre autres, de la viorne (Viburnum Opulus), du cornouillet (Cornus Alba), du noisetier (Sambucus Nigra) ou encore de l’érable champêtre auxquels s’ajoutent, en lisière, des plants inspirés des forêts nourricières : des groseillers, des framboisiers, des petits pommiers et poiriers. Le mélange des espèces garantit la richesse du sol : chacune y prend et y apporte des éléments différents en fonction de ses besoins. La diversité des espèces végétales favorise également la résilience face aux changements environnementaux.

Les avantages d’une micro-forêt sont nombreux, comme le souligne Camille Hermans, bioingénieure et Sustainability and Circular Economy Project Manager au CDEC, qui a mis en relation les différents protagonistes de ce projet dans le cadre d’une des missions du CDEC qui consiste à guider les entreprises vers des solutions qui leur permettront de contribuer à la réduction de l’empreinte carbone globale : « Les arbres captent du CO2 via la photosynthèse, donc ils réduisent l’impact carbone. Au niveau des services écosystémiques, ils permettent de lutter contre les inondations car leur feuillage et leur branchage atténuent l’impact des fortes pluies et leur système racinaire assure une meilleure cohésion du sol, donc évite l’érosion. En réfléchissant les rayonnements solaires et en fournissant de l’ombre, ils régulent la température, et l’évapotranspiration rafraîchit l’air ambiant. De plus, de nombreuses études démontrent que la nature est favorable au bien-être ». « Lors d’un stage avec l’Université dans la Nature, dans le cadre du programme B-Corp, nous avons fait une excursion où nous avons « expérimenté » la forêt avec tous nos sens, et nous avons pu ressentir le bien-être réel qu’elle procure. Il est prouvé scientifiquement qu’être en contact avec la nature régule le stress et la tension artérielle », ajoute Stefan Chorus.

Mais, pour ressentir les bénéfices de cette micro-forêt, il faudra attendre encore un peu : plus ou moins 3 ans pour commencer à voir un effet « buissonnant » et quelques années de plus pour que la micro-forêt soit mature et apporte de l’ombre.

Mélanie Trélat
Extrait de Néomag#65

Production d'ENR : un impact positif sur la biodiversité ?
Production d’ENR : un impact positif sur la biodiversité ?

On oppose souvent le développement des énergies renouvelables et celui de la biodiversité. Pourtant, après avoir exploité pendant plusieurs années des centrales photovoltaïques au sol et sur l’eau, Enovos démontre que, moyennant quelques précautions, ils ne sont pas incompatibles, bien au contraire ! Reportage Enovos

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Les champs solaires développés par Enovos à Junglinster et Beidweiler, ainsi que sa centrale photovoltaïque flottante à Differdange, ont modifié les conditions physiques des zones concernées, générant un nouvel équilibre de la faune et de la flore présentes.

Pour mesurer et suivre l’incidence de ces projets, un inventaire des animaux et plantes ainsi qu’une analyse de la manière dont ils occupent l’environnement a été dressé en amont de l’installation des centrales. Ce travail, mené par des experts en biodiversité, a commencé plus d’un an avant la construction des projets de manière à observer les activités sur un cycle de quatre saisons.
Les résultats de ces études ont été déterminants pour la configuration des projets. Ainsi, dès la conception, des dispositions ont été prises pour limiter les impacts potentiels.

Par exemple, dans les champs solaires au sol, les panneaux ont été posés à une hauteur minimale de 80 centimètres, ce qui permet aux animaux de continuer à circuler librement sur le site en passant sous les installations, mais aussi à la luminosité nécessaire à la croissance des plantes sous les panneaux de filtrer. Une distance minimale de 4 mètres a été préservée entre chaque ligne ; les oiseaux peuvent ainsi continuer à chasser depuis les airs dans la zone restée libre.

Quant à la centrale photovoltaïque flottante, elle a été posée sur un ancien bassin industriel qui servait à refroidir l’eau issue du procédé de production d’ArcelorMittal. Cet espace présentait une biodiversité très limitée, donc le fait de créer de l’ombre sous l’eau en installant des flotteurs et de mettre en place des points d’ancrage n’était pas problématique.

Quatre années se sont écoulées depuis la mise en service de la première installation et beaucoup d’a priori présents lors du développement du projet sont tombés depuis. En effet, le suivi révèle que l’influence des centrales sur leur environnement s’avère positive.

Sur le bassin, les oiseaux, qui ne faisaient auparavant que passer pour se reposer, nichent désormais sur les flotteurs situés sous les panneaux et 18 espèces spécifiques aux milieux aquatiques ont été recensées, dont 2 nouvelles espèces observées en 2023. On a même découvert, sur cette île artificielle, un nid de grèbe castagneux, une espèce protégée.

À Junglinster, la prairie maigre de fauche initiale a conservé sa qualité et la Salvia pratensis – une espèce de sauge sauvage, elle aussi protégée - qui avait été recensée a pu être préservée grâce à des précautions prises en phase de construction, pendant laquelle les machines étaient interdites d’accès dans les zones où elle poussait.

Il en va de même à Beidweiler, où 6 nouvelles espèces ont été observées. On a même pu voir une mésange bleue nourrissant ses oisillons sur la structure sous les panneaux et des corbeaux - oiseaux de la famille des corvidés - se servant des panneaux pour briser des noix.

Lors de la mise en service de telles installations, le ministère de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité oblige le porteur du projet à couper l’herbe et à la ramasser pour éviter l’apport de nouveaux nutriments au sol et la prolifération de certaines plantes au détriment d’autres.

Souhaitant éviter les travaux mécaniques et réduire les interventions humaines, Enovos a opté pour une solution naturelle - y installer des moutons – et a travaillé avec l’Administration de la Nature et des Forêts pour établir un protocole d’élevage propre à chaque site. Un nombre maximum de moutons par hectare a été défini. Sur le plus petit des deux terrains, à Junglinster, une pause est respectée pendant la floraison pour permettre aux plantes de pousser et au pollen de se répandre, le déplacement des moutons permettant ensuite au pollen résiduel de se disperser. Le site de Beidweiler a, quant à lui, été divisé en 4 parcelles où les moutons paissent à tour de rôle.

Enovos a remporté plusieurs appels d’offres pour des projets pilotes lancés par les ministères de l’Agriculture, de l’Économie, et de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité, dont l’objectif est de regrouper production agricole et production énergétique sur le même site, tout en améliorant la biodiversité.

L’installation photovoltaïque sera conçue en étroite collaboration avec l’agriculteur, en fonction de ses besoins et autour de l’exploitation. Par exemple, les panneaux pourront être implantés plus haut pour que les vaches puissent continuer à paître dans le champ et, dans l’un des premiers projets en préparation, des panneaux verticaux bifaciaux orientés est-ouest seront posés pour permettre le passage du tracteur entre les lignes.

Un suivi sera opéré sur le rendement de l’installation, mais aussi sur son impact sur la biodiversité, la production agricole et le bien-être animal.

Extrait de Néomag#65

Communautés énergétiques : une nouvelle ère
Communautés énergétiques : une nouvelle ère

Interview de Paul Zens, président de l’asbl Eurosolar Lëtzebuerg

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Les directives européennes sur les énergies renouvelables et le marché de l’électricité ont été transposées en grande partie dans les lois luxembourgeoises en 2023, précisant les contours des communautés énergétiques. Ces communautés peuvent produire, consommer, stocker et vendre de l’énergie renouvelable, mais au-delà de cela, elles offrent des avantages environnementaux, économiques ou sociaux à leurs membres et aux territoires sur lesquels elles se trouvent.

Comment une communauté énergétique se définit-elle ?

On distingue deux sortes de communautés : communautés énergétiques citoyennes et communautés d’énergie renouvelable. Cette dernière nous intéresse un peu plus, car il s’agit d’une communauté, le plus souvent sous la forme juridique d’une coopérative, dans le cadre de laquelle on partage l’énergie renouvelable produite localement. Elle est gérée par ses membres, ce qui est contraire aux habitudes qui veulent que les conditions de fonctionnement - dont le prix - soient imposées et les décisions prises par des tiers.

Elle existe à différentes échelles. Au niveau européen, le Luxembourg pourrait être une communauté énergétique à part entière vue la taille du pays, mais elle se limiterait à un partage d’énergie : quelqu’un qui a produit trop d’énergie à Clervaux pourrait la partager avec une autre personne localisée à Remich.

Les communautés locales sont beaucoup plus intéressantes, tant du point de vue économique que du point de vue sociétal car elle s’insèrent dans le voisinage, à proximité avec les avantages y relatif. Ainsi, elles profitent d’avantages tarifaires parce qu’elles n’utilisent pas le réseau du distributeur et sont donc dispensées des frais d’entretien et de rénovation des lignes. Ensuite, au-delà de l’approvisionnement énergétique, elles permettent de créer de la cohésion sociale. L’Union européenne s’intéresse, par exemple, à l’impact de ces communautés sur la précarité énergétique. En toute logique, le fait d’être très proche l’un de l’autre permet de se rendre compte que quelqu’un est en difficulté et de l’aider par la communication, l’échange de connaissances et de bonnes pratiques.

Qu’est-ce qui pourrait être amélioré dans la transposition de ces directives au Luxembourg, selon vous ?

Il y a toujours des choses qu’on peut perfectionner. Par exemple, la limite de taille d’une communauté locale est d’un rayon de 300 mètres, ce qui est inférieur à ce qui a été défini dans d’autres pays. Ce rayon pourrait être élargi.

Ce qui doit être amélioré aussi, c’est la communication à ce sujet. Les citoyens doivent être informés des possibilités qu’ils ont. Par exemple, ils doivent savoir qu’une communauté énergétique ne concerne pas seulement l’électricité mais qu’elle peut aussi concerner le chauffage, que le concept va plus loin que le simple fait de partager de l’énergie pour gagner en indépendance, que cela se fait toujours en partenariat avec des entreprises et la municipalité et qu’il n’est donc pas nécessaire d’être un spécialiste pour se lancer. Et puis, il faut donner une forme juridique à une telle communauté qui, dans la plupart des cas, est une coopérative dans laquelle les membres ont des parts, mais je pense qu’on manque de compréhension sur la manière de l’organiser.

Nous allons travailler sur la communication, car les citoyens, mais aussi les entreprises et les communes, ont encore besoin d’explications. Les municipalités doivent disposer non seulement des connaissances, mais des ressources humaines ou financières pour acquérir les connaissances, et ensuite les transférer à leurs citoyens.

La participation citoyenne implique un changement d’habitudes : jusqu’à présent, on décidait prioritairement à deux - les grandes entreprises monopolistiques et les autorités publiques - et il faut maintenant partager la prise de décision avec un troisième acteur - les citoyens. C’est un ménage à trois un peu particulier, mais qui peut être rentable pour la société. Et le discours participatif est ce qui fait que la démocratie fonctionne.

Il faut ajouter que, si le secteur de la construction et de l’urbanisation est en grande partie à l’origine des problèmes de réchauffement climatique que nous connaissons, il est aussi, de facto, une partie de la solution et un levier d’action majeur. Il ne faut donc pas seulement motiver les citoyens à agir (parfois en les culpabilisant), mais s’adresser aussi aux communes et aux entreprises de construction. C’est un tout comme toujours : c’est avec la participation active des uns avec les autres que nous atteindrons nos objectifs.

Quel est le rôle de chacun dans une communauté énergétique ?

Lorsqu’une commune planifie le plan d’aménagement particulier (PAP) d’un nouveau quartier, elle doit travailler de concert avec les ingénieurs et les architectes pour prévoir un local où la communauté énergétique pourra se réunir, mais aussi un dispositif de stockage commun. Les batteries jouent un rôle primordial dans la transition énergétique - en particulier les grosses batteries communes qui ont plus de flexibilité que les batteries individuelles -, mais il faut privilégier les batteries thermiques à celles au lithium, même si elles ont une densité énergétique moins importante et occupent dès lors un plus grand espace. Je le répète souvent : en tant que maître d’ouvrage, il ne faut pas être trop gourmand ; on construit selon ses besoins et ses objectifs, mais aussi dans un contexte géographique et dans un contexte temporel. Et aujourd’hui, nous traversons une crise climatique, donc il faut revoir nos modes de pensée.

C’est ce qui a été fait à Schwebach (commune de Saeul) où une communauté énergétique a été créée dans un lotissement de 16 maisons : l’infrastructure est financée et exploitée par la communauté et l’approvisionnement est assuré par la production solaire locale, en consommation directe.

Mélanie Trélat
Extrait de Néomag#65

Natur auf Zeit : simplification administrative et sécurité juridique
Natur auf Zeit : simplification administrative et sécurité juridique

À l’époque que nous vivons, l’écologie et la biodiversité sont au centre des débats politiques, et en même temps donnent lieu à d’importantes controverses. La croissance économique, ainsi que l’émission de gaz CO₂, ont visiblement porté préjudice à la nature dans laquelle nous vivons.

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Le comportement humain a causé, entre autres, l’extinction de diverses espèces d’animaux mais aussi, de l’avis de nombreux experts, le réchauffement climatique, sujet qui est extrêmement thématisé.

Nombre d’États, dont le Luxembourg, se sont engagés dans la lutte contre le réchauffement climatique en encadrant l’activité économique et industrielle par des lois et des réglementations strictes, souvent dictées par le droit européen. On peut constater dans ce contexte que d’après les chiffres annoncés, plus de 27 % de la surface du territoire national luxembourgeois sont actuellement protégés sous le statut de zone Natura 2000, contre une moyenne européenne de l’ordre de 18 %.
Justement, vient d’être adopté au niveau européen le règlement relatif à la restauration de la nature, qui obligera les États membres de l’Union européenne à restaurer graduellement les habitats en mauvais état, sachant que d’après l’état des lieux actuel plus de 80 % des habitats européens seraient en mauvais état.

En même temps, au niveau national les dispositions de la loi modifiée du 18 juillet 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles s’appliquant spécifiquement à des terrains à l’intérieur ou à proximité des zones urbaines, déjà urbanisés ou destinés à être urbanisés, ont fait l’objet de critiques pour être trop contraignantes et pour créer des obstacles matériels et financiers à un développement de ces terrains.

Le gouvernement ayant annoncé par le dépôt du projet de loi n°8308 en date du 13 septembre 2023, donc encore avant les élections parlementaires d’octobre 2023, des modifications de la loi précitée, dans l’introduction d’un principe « Natur auf Zeit », ou « nature temporaire », impliquant qu’aucune compensation ne sera requise pour la création de nouveaux habitats ou de biotopes, par abandon ou gestion spécifique, s’il se situe sur des terrains urbanisés ou destinés à être urbanisés.

Définition de la notion « Natur auf Zeit »

Le principe de « Natur auf Zeit » se base sur une différenciation entre les zones vertes, qui sont sujettes à des restrictions fondamentales en ce qui concerne leur utilisation, et les zones qui sont destinées à être urbanisées. Ces zones qui sont destinées à être urbanisées sont donc susceptibles de connaître des dérogations substantielles par rapport à la protection stricte qui est prévue pour les zones vertes. En langue allemande, on parle aussi de « Zwischennutzung » (utilisation intermédiaire) qui permet d’utiliser temporairement une parcelle encore non construite pour stimuler la biodiversité sans que cela n’empêche de poursuivre, ultérieurement, des projets de développement. Autrement dit, les propriétaires et les utilisateurs de terrains éligibles peuvent mettre temporairement leurs parcelles à disposition de la nature aussi longtemps que ces terrains ne sont pas utilisés à d’autres fins.

Même si le concept de nature temporaire semble être une innovation adaptée pour assurer un équilibre entre les intérêts des propriétaires et la protection de la nature, il ne manquera pas de susciter des débats quant à son application pratique.

Ainsi, certains craignent que, par l’attractivité des zones de nature temporaire, des espèces soient d’abord attirées et puis endommagées lorsqu’un biotope une fois créé est détruit dans le cadre du développement du site, et qu’uniquement les espèces très mobiles auraient la capacité de se déplacer par la suite.

De l’autre côté, l’application du principe de « Natur auf Zeit  » permettrait non seulement de créer plus de sécurité juridique pour les propriétaires des terrains concernés, mais aussi l’amélioration de la diversité écologique, favorisant la biodiversité et le microclimat urbain. Cela peut également emporter des avantages sociaux en offrant un encouragement des projets communautaires comme des jardins urbains ainsi qu’une certaine flexibilité par rapport aux adaptations rapides aux changements des besoins urbains. De plus, l’implémentation d’un tel projet permettrait une protection du climat, ayant un effet régulateur pour le moins temporaire sur la température en milieu urbain, ce qui devient de plus en plus important.

L’exemple de l’Allemagne

Le Luxembourg ne serait pas le premier pays dans l’Union européenne à adopter le mécanisme de « Natur auf Zeit ». En effet, l’Allemagne et les Pays-Bas l’ont déjà intégré dans leurs législations.
En Allemagne, au niveau fédéral une modification du § 1 du Bundesnaturschutzgesetz (BnatSchG) par l’ajout d’un paragraphe (7) prévoit dorénavant que « Les objectifs de protection de la nature et d’entretien des paysages peuvent également être servis par des mesures qui n’améliorent l’état des biotopes et des espèces que pour une période limitée, par l’utilisation, l’entretien ou la possibilité d’une succession non dirigée sur une surface. »

Aussi, le paragraphe (3) du § 3 du BNatSchG prévoit « qu’en ce qui concerne les mesures de protection de la nature et d’entretien des paysages, il convient d’examiner en priorité si l’objectif peut être atteint à un effort raisonnable par des accords contractuels ».

Différents états fédéraux ont déjà suivi, comme par exemple la Rhénanie du Nord-Westphalie qui a incorporé le concept « Natur auf Zeit » dans son § 30 Abs. 2 Nr. 3 du Landesnaturschutzgesetz, selon lequel ne constitue pas une atteinte à la nature et au paysage : « La suppression de biotopes créés par la succession ou l’entretien, ou la modification de l’aspect du paysage sur des surfaces qui ont été légalement utilisées dans le passé à des fins de construction ou de circulation, en cas de début d’une nouvelle utilisation ou de reprise de l’ancienne (nature temporaire) ».

Législation luxembourgeoise et objectifs

C’est notamment la loi du 18 juillet 2018 relative à la protection de la nature et des ressources naturelles qui règle la question de la protection des biotopes au Luxembourg. Dans cette loi figurent les principes comme l’interdiction de détruire sans autorisation assortie de conditions des biotopes ou des habitats, ainsi que la protection particulière des espèces et l’obligation de compensation qui existaient déjà depuis la loi du 19 janvier 2004. Comme il a déjà été relevé, le projet de loi n°8308 devant modifier la loi précitée vise à « alléger ou accélérer un certain nombre de procédures d’autorisation », « augmenter la sécurité juridique dans le cadre des procédures d’autorisation », « favoriser et promouvoir les éléments écologiques au sein des zones urbanisées respectivement dans leur proximité », et «  promouvoir le rapprochement entre les projets causant les destructions de biotopes avec leurs mesures compensatoires prescrites ».

Ainsi, un ajout à l’article 17 est proposé prévoyant que « Ne sont pas considérés comme biotopes protégés, les biotopes nouvellement créés ou générés par une mesure ciblée, par une gestion spécifique ou par un abandon de gestion, s’ils sont situés sur des terrains compris dans une zone urbanisée ou destinée à être urbanisée selon un Plan d’aménagement communal dûment approuvé au moment de la signalisation à l’Administration de la nature et des forêts de l’intention de créer ou générer ces biotopes. »

Au moment de la rédaction de cet article, le projet de règlement grand-ducal prévu pour fixer le cadre et les modalités d’application de cette disposition n’a pas encore été rendu public ; il est évident que ce projet sera d’un grand intérêt pour les administrations et les praticiens, de sorte qu’il sera utile de la saluer en parallèle au processus législatif relatif au projet de loi n°8308.

Par Me Mario Di Stefano, Managing Partner – Avocat à la Cour, DSM Avocats à la Cour
Extrait de Néomag#65

Évaluer les risques pour déterminer les besoins en assurance
Évaluer les risques pour déterminer les besoins en assurance

Le sujet du développement des quartiers, de l’urbanisme et des territoires est très étroitement lié à l’assurance, et cela par de multiples aspects. Il y a d’abord une part très importante concernant la bonne analyse du risque. Puis il s’agit d’avoir les bons contrats d’assurance avec les bonnes garanties.

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En tant que courtier, AlliA Insurance Brokers Luxembourg se doit de vérifier que les clients souscrivent les produits adéquats avant, pendant et après la réalisation des projets.

L’évaluation des risques joue un rôle crucial pour déterminer les besoins en assurance de nos clients. Nous pourrions citer une liste des éléments à vérifier mais celle-ci ne peut être exhaustive tant les projets doivent être examinés au cas par cas en raison de leurs spécificités géographiques, techniques ou environnementales. Chaque spécificité peut influencer les primes d’assurance, que ce soit à la hausse ou à la baisse. Prenons quelques exemples : les caractéristiques géographiques et climatiques des territoires influencent les risques d’inondation, de tremblement de terre ou de tempête, ce qui affecte les primes d’assurance. De même pour les risques environnementaux : la proximité d’industries polluantes ou de zones à risques influencera également les primes d’assurance vers le haut. La qualité des sols et la présence d’un point d’eau auront encore un impact sur les garanties et primes proposées. Tous ces risques sont analysés grâce aux outils gouvernementaux mis à disposition du public. C’est d’ailleurs les zones à risques désignées par les autorités que les assureurs prennent en compte pour ajuster les primes proposées aux clients.

A contrario, une bonne description du projet peut permettre d’affiner la tarification de l’assurance vers le bas. La qualité des infrastructures et la sécurité publique peuvent influencer les coûts de l’assurance de manière positive : des infrastructures bien entretenues, modernes, avec une grande qualité dans les services d’urgence, faciliteront un bon environnement et une faible sinistralité. Lorsque des projets de rénovation urbaine améliorent la sécurité et l’attractivité d’un quartier, ils peuvent également influencer positivement les primes d’assurance en réduisant les risques. C’est de cette manière que doivent être appréhendés les nouvelles constructions ou les projets de réhabilitation des territoires.

Chez AlliA Insurance Brokers Luxembourg, nous nous engageons à offrir des solutions sur mesure qui répondent à des exigences spécifiques. Nous travaillons avec un réseau important d’assureurs et chaque membre de l’équipe possède une expertise et une connaissance approfondie dans son domaine. Nous disposons également d’ingénieurs spécialisés en interne, capables de réaliser des audits et de préconiser des mesures de protection et des améliorations qui permettront de rendre le projet à assurer moins risqué. Combiner les expériences des spécialistes des grands risques, des collectivités locales et de la construction nous permet d’avoir une vision globale des projets urbanistiques d’ampleur et d’apporter un service de qualité à nos clients.

L’analyse d’un projet d’urbanisme en assurances est toujours multidimensionnelle et rend chaque dossier unique et complexe : la détermination des coûts de l’assurance est fonction de nombreux éléments. Il est donc important de nous fournir le plus de détails possibles pour que le tarif et les garanties proposés collent le plus possible à la réalité du client.

Céline Caccialupi, Julie Berezecki, Mathieu Rouyer et Vanessa Krackenberger, Account Managers
Extrait de Néomag#65

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