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Un parc pour tout et pour tous

Un parc pour tout et pour tous

Lauréat du Bauhärepräis 2024, le projet de réaménagement du plus grand parc de la Ville de Luxembourg, situé à Gasperich, s’est achevé en 2023 après 3 ans de travaux. Il inclut la renaturation du Drosbach sur 810 m et d’un étang de 7 000 m2.

Un reportage de l’Ordre des Architectes et des Ingénieurs-Conseils, avec Carlo Mersch, ingénieur-paysagiste, membre de l’OAI

Un cadre multifonctionnel au cœur de la ville

Sur ses 16 ha au centre du quartier très urbanisé du ban de Gasperich, le parc offre la possibilité d’une panoplie d’activités diverses, qu’elles soient dynamiques ou plus contemplatives, à commencer par la promenade ou le jogging, avec 2,5 km de chemins, dont une partie sur pilotis de manière à rendre l’espace accessible quelle que soit la météo. L’axe principal a une largeur de 4 m pour faciliter le passage des engins d’entretien. Deux cercles, de part et d’autre du parc, visibles du ciel, forment un « corporate design ». Le premier est une pelouse de manifestations, dédiée à l’organisation de concerts et autres évènements. Raccordée aux réseaux d’électricité et d’eau, cette zone propose aussi un pavillon qui peut servir de refuge si le temps tourne à l’orage. Le second est une aire de jeux pour enfants. Le parc regroupe aussi un verger, des espaces de rencontre et de repos équipés de transats, bancs et tables de pique-nique en bois. La buvette qui ouvrira ses portes au printemps animera bientôt le lieu.

Au centre, le Drosbach renaturé

Prenant sa source à Leudelange, dans la région des marnes jurassiques, pour se jeter dans l’Alzette à Howald, le ruisseau serpente à travers le parc.

Un mémoire, émis par l’Administration des services du géomètre et des parcs de la Ville de Luxembourg, décrit son état initial : « La capacité de stockage d’eau relativement faible des sols et l’écoulement rapide des eaux de surface des zones d’activités adjacentes entraînent, lors des précipitations, une élévation très rapide du niveau de l’eau et des inondations fréquentes. Le lit du ruisseau a été rectifié dans la région et souffre d’une forte érosion en raison de l’absence de haies protectrices ».

Carlo Mersch, qui a conçu le projet alors qu’il était à son compte chez Carlo Mersch ingénieurs-paysagistes et travaille désormais sous la bannière LSC360, précise : « Avant notre intervention, c’était un canal rectiligne, avec la pâture de chaque côté, conçu sans aucun ombrage et sans la moindre réflexion sur la qualité de l’eau. Nous l’avons placé au point le plus bas du terrain et remodelé. Nous avons établi les plans sur base des études hydrologiques réalisées par le bureau TR-Engineering. Les grands principes étaient arrêtés dans ces plans, mais nous avons décidé des détails sur site, ensemble avec l’Administration de la gestion de l’eau (AGE) ».

Les mesures de renaturation mises en œuvre comprennent l’élargissement du lit du ruisseau avec une cuvette peu profonde, de 15 à 40 m de large, qui permet à l’eau de suivre son propre chemin en formant des méandres, limitant ainsi les risques d’inondation, ainsi qu’une élévation du fond du cours d’eau de 50 cm à 1 m.

Une variété végétale

On trouve, dans ce parc, une alternance de surfaces ouvertes et de surfaces boisées, de pelouses structurées et de prairies fleuries qui ne sont fauchées qu’en juin pour favoriser la biodiversité.
Pour l’instant, le terrain semble assez nu et il faudra encore quelques années pour qu’il exprime pleinement son potentiel. « Contrairement aux bâtiments des architectes, qui atteignent leur apogée esthétique dès leur construction, notre travail de paysagiste nécessite une dizaine d’années avant de révéler ses résultats. Nous avons planté de jeunes arbres qui vont encore grandir. À terme, une forêt alluviale de 10 à 15 m de large bordera le Drosbach. En créant de l’ombre sur le ruisseau, les arbres éviteront que l’eau se réchauffe, faisant baisser le taux d’oxygène et proliférer les algues. Sur la plaine de jeux, les arbres sont plus hauts : ils sont âgés d’une quinzaine d’années et mesurent 7 à 8 m. Leur plantation s’inscrit dans une démarche de compensation des arbres abattus lors de de la construction du tram. Nous avons également prévu des zones de végétation spontanée autour du ruisseau et dans l’étang. Le milieu aquatique, particulièrement nourricier, favorise l’évolution des plantes qui ont une fonction autoépuratrice. L’étang, d’une profondeur maximale de 2,2 m, a ainsi vu se développer une roseraie, qui va certainement coloniser toutes ses berges. Il est alimenté par la nappe phréatique et n’est pas en contact direct avec le Drosbach, même si ce dernier peut s’y déverser en cas de crue ».

Un parc pour les hommes

Le parc apporte de nombreux bénéfices environnementaux, mais il a avant tout été pensé dans l’intérêt de ses personnes qui vivent et travaillent dans le quartier. « Les prairies à fleurs couvrent environ la moitié de la superficie, en équilibre avec les pelouses entretenues. Elles abritent des écosystèmes variés, en particulier des oiseaux nicheurs. Elles restent cependant accessibles au public. Nous n’avons pas voulu ôter quelque chose aux gens car ce parc est fait pour eux. La biodiversité est un atout, mais ce n’est pas le principal. De toutes façons, je ne pense pas que qui que ce soit aura l’idée de jouer au ballon dans une prairie à fleurs, peut-être quelqu’un fera-t-il quelques pas à travers vers l’étang, mais et alors ? Ce n’est pas problème ! », conclut Carlo Mersch.

Mélanie Trélat
Article tiré de Neomag #69 - mars 2025

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Publié le vendredi 28 mars 2025
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